quand la bombe est tombée…

quand la bombe est tombée, je cherchais du sens, je regardais l’agitation, je souffrais d’inutilité, je tendais la main pour vivre, je tendais la main simplement pour attirer leur regard, elle ne regardait pas ailleurs quand l’explosion l’a détruite, l’agitation n’avait pas plus de sens après, j’avais mal, je pleurais, je criais, j’ai regardé ses ruines se creuser sous le feu, le passé s’est enfui dans les flammes, les êtres ont fusionné avec la roche, inutile trace de leur passage, il ne me reste plus mes yeux pour pleurer, la bombe n’a pu effacer les images en moi, celle du ciel nuageux au-dessus des toits, celle de son visage amoureux, celle du mépris de mon frère quand j’ai décidé de tout quitter, j’ai trop de bruits dans ma tête, j’ai trop de ruines dans mon coeur pour oublier, j’ai trop d’images en moi pour accepter la mort, la délivrance s’est enfui comme la vue, maintenant je suis ému, je prends toutes les émotions en plein ventre, le moindre sentiment qui entre à proximité me touche à coeur, la musique chaotique des joies ou la sérénade des tristesses ainsi que le répétitif lamento de l’incertitude bouleverse mes neurones, je suis perdu dans un maelström d’émotions étrangères, et pourtant je dois traverser ces ruines pour toucher au-delà des rochers la certitude des peut-être.

photo sleep du photoblog life inchoate

Pigment

Issue du noir, l’épaisseur bleu cherche une vie, être plus qu’un contraste au rouge, ronger le halo d’ombre pour happer de sa sensualité les rythmes de fuite, s’abstraire du reflet frissonnant, la pierre-glace cligne de l’oeil pour confondre notre désir nu, le rouge-fantasme n’est qu’une fictive amnésie, abstraits traits d’ombres intérieures qui dénient le glacial hors champs, ces sous-entendus rendent brûlant le pigment, cette matière irréelle plus forte que la chair humaine, ne pas se diluer dans le flou chromatique, la couleur s’efface dans le miroir de mon regard, grésillement morbide

Abstraction series I (1 of 7) du photoblog Pygment

Rage de mots

Je cherche la connexion des mots qui brilleront de mille feux,
je cherche la rage des phrases qui changeront les rires
je cherche l’ombre des verbes qui descilleront l’émotion
je cherche l’orage de mots qui défigurera enfin les apparences
je cherche l’or des verbes qui coulera d’un vrai scintillement
je cherche la vie des phrases qui respirera un peu de la fragilité
je cherche l’explosion des verbes qui intimeront le rire au tonnerre
je cherche l’entrelacement des mots qui froisseront l’intimité
je cherche l’abîme des phrases qui s’enfuiront plus loin que les ténèbres
je cherche l’idée des mots qui découvriront la crise joyeuse du voisinage
je cherche la phrase qui n’oubliera rien de son auteur
je cherche le verbe qui ne se brûlera pas que de mots
je cherche le mot qui ne se dénudera que pour la phrase.

d’après la photo neurons du photoblog m.bevers

Sous l’exposition

accepter les regards
cette sur-impression des regards
ces sourires ou ces dépits des regards
ces formes étranges qui m’entourent sans regard
tant de choses incompréhensibles comme ces deux visages privés de corps
tant de choses qui me manquent, des regards

il est loin le paradis perdu de l’atelier
où je m’ennivrais d’un seul regard amoureux
ses gestes sur moi bouleversaient mes pensées
il se cherchait en moi
transformant sans cesse mes couleurs, mes formes, mon horizon
un jour il a crié sa jubilation
il m’a manqué les larmes

Tout est figé dans une triste grisaille
les voyages soupirent de tristesse
Je sens ma vie s’effacer sous le poids des images
Ne restera-t-il un jour qu’un reflet de moi sur l’improbable fenêtre d’un collectionneur?

d’après Sous l’exposition de Liminaire: le Bloc-Note de Pierre Ménard

Marionnette pendue

Le diable est pendu, tel un ange noir quisurplombe nos vies, cette marionnette reste capable de se jouer de nous, elle capte notre folie pour la fossiliser sur un mur, prisonnier de nous-même il faudra la tuer encore et encore pour se libérer perpetuellement de ses démons, chaque fois que l’on croit fuir, la marionnette invoque à dessin nos travers ou d’un rire étranglé s’illumine de nos faiblesses, la garder, la regarder comme temoin aveuglant de notre humaine fragilité.

d’après la photo Hanged Puppet du photoblog A look trough lens

je regarde en haut

Je regarde toujours le ciel, je regarde toujours vers le haut, je ne sais jamais où je vais, je marche et je regarde, je ne suis jamais ébloui, parfois brutalement submergé par la tristesse, par l’ennui ou pire par l’indifférence quand je croise leurs regards, je marche vite, je fuis vers le haut, je deviens feuille d’arbre pour me moquer de la fin des sentiments et attendre l’automne pour, enfin, mourir sans effort, il me suffirait d’attendre un balayeur ou la semelle du requin pour m’enfoncer ad-patres

je marche en rond autour des arbres, j’enflamme de mon regard les plûmes des pigeons, je suis enfermé dans un air torride qui me serre, je respire et pourtant je doute de mon existence, je m’enfuie de la folie, j’entends ses lourdes tennis frapper le sol derrière moi, je ne suis pas fou,

je regarde toujours en haut, je voudrais être un nuage, je voudrais être léger pour m’élever dans un souffle d’air, je pourrais enfin regarder vers le bas, j’observerais les hommes marcher inconscients de la menace, je verrais leurs destins planer comme un vilain doute, je rirais de les entendre fanfaronner si fort sans peur du lendemain, je suis trop fatigué maintenant, je ne me relèverais pas tout de suite, je vais attendre un peu, je vais laisser mourir la douleur d’être ici.

d’après la photo Big Foot du photoblog 16h12.com

Emotions de nuit

Dans la course effrénée du temps, je garde au creux des mes yeux la vibration du bleu, ces particules lumineuses qui captent notre ailleurs puis le laisse disperser, aveuglante séduction d’une cacophonie, autres étoiles explosant de solitude, juste avant de quitter l’orbite des amours terrestres,

quelque part vers les pôles, les âmes s’attachent boréales aux êtres humains, à celles qui prennent le temps d’être là, d’exister au milieu de cette nuit d’émotions.

d’après la photo Night in motion du photoblog Fellow Eskimo Photography

Prison de l’oeil

Mon regard ignore les détails
Les grillages de mes pensées emprisonnent ma vue
Je n’etends plus les images chanter
Mon regard ignore la douceur
Les couleurs de mes humeurs se mélangent
Je ne perçois plus la caresse du pinceau
Qui me dessine?
Mon regard ignore l’inconnue
Le mur de mes paupières refusent de la dévoiller
Je risque la folie à fixer le point aveugle
à m’abimer dans cet espace incertain
où l’oeil est sa propre cage noire
Les images m’absorbent et me rejetent hors de moi
Je ne peut être un autre
condamné à observer de l’autre côté
le rouge construit brique après brique
l’impalpable barrière
entre moi et la vie

d’après la photo Protected Wall du photoblog Photographic Odyssey

l’evanouissement d’une fleur

je ne sais plus si je t’ai jamais fait de cadeaux, je me souviens de rien tu le sais bien, tu m’offrais ton corps, tu aimais ma tendresse, j’avais ces gestes simples qui rassurent un quotidien, tu avais la fantaisie d’un bord de mer, je te faisais des plats de reine que tu dégustais lyriquement, ta parole et ta vie irrévérencieuse en choquait plus d’un, sauf moi, j’aimais vivre en liberté avec toi, tu respectais seulement les belles églises avec ton signe de croix quand on passait devant, notre vie coulait comme des nuages haut perchés dans les cieux, j’ai voulu pour une fois t’enivrer avec des fleurs, tu t’es évanouie de joie, à tout jamais.

d’après la photo Sitges : La calle se llena de flores du photoblog de Miradas de Paky

les trois éléments

Avant il y avait la mer, la vie
Maintenant il y a la rouille, la décomposition
Avant il y avait l’agitation, la joie
Maintenant il y a l’immensité, le vide
Avant il y avait les jeux, les conversations
Maintenant il y a les galets éparpillés, les rafales démentes
Avant il y avait les fremissements de l’eau, les éclaboussures ivres
Maintenant il y a les ondulations froides et menacantes du sable, les nuées ardentes du désert

Avant il y avait le ciel bleu, ta lumière
Maintenant il y a le gris infini, ton absence
Avant il y avait ton baiser débordant, ton rire tendresse
Maintenant il y a ta disparition, ton souvenir.

d’après Three Elements #1 et #2 du photoblog chromasia