Folie des mots

Juste un cri
folie des mots
la phrase arpente un dédale
à la rencontre d’une absente.

(Journal des mots 6 novembre 2019)

quand le tourbillon est parti j’ai su ce qui manquait

Chapeaux

Longtemps je me suis assis au milieu des chapeaux, et dès qu’il y avait du soleil je sortais prendre l’air, attendre le chaland, quand j’étais fatigué alors je prenais une chaise et je me posais au milieu de chapeaux,

j’avais repéré que c’était l’endroit stratégique pour voir ces dames faire leurs essayages, ni trop proche pour les gêner, ni trop loin afin de les encourager et de leur faire les compliments qui vont bien, souvent quand il ne se passait rien je me laissais aller à ma tristesse,

difficile de dire ce qui me manquait, vu de l’extérieur tout allait bien et la vie s’écoulait doucement dans une ville paradisiaque au bord de la Méditerranée, je ne manquais pas d’amis et nous prenions du bon temps, la boutique m’accaparait, entre les ouvertures et les approvisionnements j’étais très occupé,

dès qu’il y avait un interstice de libre, je me sentais triste, parfois jusqu’au larmes, tout était lisse, calme et sans relief, ma vie n’était pas morne non, je dirais plutôt atone, jusqu’au jour où cette petite fille est sortie de nulle part pour danser devant la glace de ma boutique,

selon les chapeaux sa chorégraphie changeait et à chaque fois elle jetait un coup d’oeil très rapide dans ma direction à la fois pour avoir mon avis et pour savoir si elle avait le droit, mon sourire n’a fait que l’encourager, chaque jour j’espérais plus et chaque jour je souriais,

et puis quand le tourbillon est parti j’ai su ce qui manquait, l’insouciance, cette folie qui nous fait oublier l’avenir, la petite fille est revenue plusieurs fois parfaire sa leçon et j’ai finis par lui offrir un chapeau,

longtemps je me suis assis au milieu des chapeaux et jamais je n’ai oublié ses pas de danse, maintenant qu’il ne me reste plus que les yeux et la tête pour rêver je ne me lasse pas de cette photo.

contempler les tourbillons

contempler les tourbillons
ces tempêtes de mots légers
cacher dans les vents fuyant
ils passent mais laissent
leurs débris d’ailleurs

(journal des mots, 3, 5 janvier 2012)

attraction sensuelle

Dans une nuit noire et blanche
entre sommeil et éveil
de doux cris
provoquent une attraction
fatale vision qui surgit
mourir foudroyer
avec dans le fond de l’oeil
la persistance sensuelle

d’un corps lunatique

d’après le photoblog Zul-Photo, inspiré de la photo Moon attraction

Arroser

Arroser ses fleurs et penser aux cadeaux, regarder les gouttes qui en pluie réjouissent les plantes, on dirait presque qu’elles sourient,  avec ses feuilles qui se déplient d’aise, arroser et regarder s’écouler les tracas, ceux qu’on avaient eu du mal à oublier sur le chemin du retour, espérer secrètement que l’arroseur de stress sera un jour arroser à son tour.

(série quotidien)

Table

S’asseoir autour
rire, bavarder, boire sans penser à demain
s’asseoir devant
compter, classer, lire sérieusement en pensant à demain
s’asseoir autour
manger, s’enivrer, faire durer en se souvenant d’hier
Tout poser dessus pour se soulager
et quand la table est vide, la vie semble absente
cherchant son âme.

(série Quotidien)