C’est fait

Je me sens vide, tous ces mots déposés sur une page blanche, ces mots enchaînés au monde, le noir a glissé si vite de ma point Bic, j’avais la rage et pourtant tout s’envolait avec légèreté, l’évidence de la méchanceté, je ne voulais pas entrer dans cette spirale, je n’en pouvais plus, je devais tenter ce cri, mettre un peu d’ordre, trouver peut-être ce qui me fait si mal, cette douleur invisible comme une peur idiote d’être un peu plus qu’une silhouette au milieu du bruit et de la fureur, j’ai tracé sur ce cahier des lignes clairs, dessiné un fragment de moi, si seulement je pouvais comprendre avant qu’il ne soit trop tard.

d’après le photoblog A day in a librarian’s life, inspiré de la photo Done

Sombre

De halo en halo, je marche sans voir une seule ligne d’horizon, je sombre dans ce labyrinthe et le pire est que je ne cherche rien, je marche et j’attends juste le prochain halo de lumière, je n’ai même pas l’espoir de trouver la sortie, de respirer à nouveau à l’air libre, de rencontrer quelqu’un ou qu’il y ait à nouveau un halo de lumière, je marche sans rien voir sans but, je suis de plus en plus fatigué, je tourne peut-être en rond dans ce tunnel noir et sans aucun son, et comme je suis muet, je ne peux même pas vérifier si je vis encore en criant, je suis certain de ne pas rêver, je ne cherche pas à me réveiller, je marche droit devant jusqu’à la fin

La photo At the Batcave vient du Tumblr de Lionel Dujol

Glacé

Je n’attends plus rien, je me sens libre, si libre devant cette immensité, ce froid apaise toutes mes angoisses, enfin je regarde le présent avec calme, une joie paisible gagne avec une vitesse inattendue tout mon corps, si chaque pore de ma peau a froid, en revanche chaque cellule intérieure est bien au chaud dans un sentiment de quiétude, je me sens flotter dans un doux état de léthargie, je n’ai pas envie de dormir mais juste de me laisser aller, de ne plus penser à rien d’autre qu’à regarder cette étendue glacée, cet espace enfin accueillant

d’après le photoblog 10mmgalore, inspiré de la photo Frozen

Regard enchainé

Je ne parvenais plus à rêver, ma tête vide promenait ses yeux dans un monde grisâtre, quelques visages qui passent ne rassure pas ma peur de solitude, je voudrais pouvoir oublier cette lumière, ce halo aveuglant qui m’empêche de revenir en arrière, la réalité n’était même pas insupportable, je ne sentais aucune culpabilité, simplement j’aurais tant aimé comprendre cet enchaînement qui enfermait définitivement mes pensées au point d’être pire que toutes les obsessions

d’après le photoblog caffeine+, inspiré de la photo Street Motion, Sapporo, Hokkaido, Japan, 2010

Lumière!

Je me suis évanoui ici, la musique des pas m’a éblouie d’un tempo trop lancinant pour mes pensées en désordre, des souffles inquiets et des percussions trop envahissantes sur ces murs froids, l’escalier vacillant m’a soudain bousculé et j’ai tenté de ne pas tomber, de lutter contre cette fatigue insidieusement permanente qui reprend le dessus, de m’accrocher aux silhouettes un peu flou qui sont devenu, avec brusquerie, silencieuses, et puis cette chute insensée vers le sol.

d’après le photoblog Caffeine+, inspiré de la photo Silhouette Sapporo, Hokkaido, Japan

Ma ville est vide

Ma ville est vide, ce n’est pas une explosion nucléaire ou autres catastrophes, ce n’est pas un jour férié, ce n’est pas l’heure creuse où tout s’absente sans qu’on ne sache pourquoi, ce n’est pas une évacuation préventive face à une intempérie majeure, ce n’est pas un montage, c’est mon crime qui m’enlève toute vie intérieure, la culpabilité efface toute présence humaine, une paranoïa poussé tellement loin que même mes yeux se jouent de moi, ce vide insensé visant à vouloir me faire basculer dans la folie alors que c’est aux autres de disparaître, ce serait si bon d’être le seul homme en vie avec tout à moi, pour moi et à cause de moi, devenir le maître du monde pouvant faire cesser tous ces sons absurdes qui ne font rien que contredire ce que je vois et ce que je veux, non, non, non, je ne peux pas penser sans le silence absolu.

d’après les photos de Matt Logue, inspiré de la photo Untitled #46 de la série Empty L.A.

Dans un fauteil

Est-ce que ma vie n’a tenu qu’à un fauteuil? Je me déformais à petits feux dans le mien tout en rêvant à celui du grand patron, fantasme d’un siège solide où l’éternité vennait à toi sans aucun effort à faire,
quand la vie s’enfuyait de mon corps, j’étais venu laminer mon bureau puis mon étage, puis… je déchirais des petits morceaux de papier peint, je cassais ce que ma force me permettait, mon couteau faisait des merveilles, un cadeau de maman,
quand la fatigue était trop forte, je regardais la décrépitude envahir l’immeuble et j’attendais l’affection opportuniste pour enfin me délivrer de tout ce qui me ronge, pire encore que la maladie

d’après la série « The Ruins of Detroit » de Yves Marchand&Romain Meffre, inspiré de la photo Donovan Building.

Jeux graves

Nos jeux et nos folies s’entrechoquaient sans penser à demain jusqu’à ce que la ruine affecte peu à peu nos lieux de luxure laissant pantois ces objets si rassurants, notre vie belle, et nos corps trop légers dans les gravats s’évanouissaient tout doucement dans la lumière… parfois par beau temps il nous est permis de repasser quelques secondes, dans le rayon de lumière, damnation éternelle de voir la décrépitude inexorablement gangréner notre passé.

d’après la série « The Ruins of Detroit » de Yves Marchand&Romain Meffre, inspiré de la photo Ballroom, Fort Wayne Hotel

Musique désarticulée

Il y avait ces moments de grâce où assis devant le piano mes mains appuyaient sur la mélancolie des auditeurs, les larmes glissaient généreusement sur les visages de mes geôliers, je riais des sous-entendus et des aveux de ma musique, ma langue avait finis par ne plus me manquer, ils n’avaient pu m’arracher que cela, leur tortures et leurs humiliations n’étaient qu’un ersatz des bouleversements du monde fuyant sa ruine, les mots étaient devenus si vains face au désastre, il m’a fallu à peine quelques semaines pour les amener au désespoir, à cette rage de tout détruire autour d’eux et… j’ai souris en sentant mon corps se désarticuler sous leurs balles.

d’après la série « The Ruins of Detroit » de Yves Marchand&Romain Meffre, inspiré de la photo piano

Mon oeil surréaliste

Entre deux moments surréalistes, je n’arrivais plus à rêver l’autre coté de la porte, cet au-delà de ma vie faite de scotch plissés et informes, tout est cassé en moi sans ces songes si sensuels qui décrispent ma mâchoire, si demain la porte s’ouvre est-ce que je reconnaitrais mon oeil?

d’après le photoblog More Reveries, inspiré de la photo Eye