S’asseoir

Ne plus savoir où s'asseoir, la vie en ruine, marcher,marcher, chercher une blancheur où se poser, ne plus savoir où s'asseoir, si l'on peut s'asseoir, marcher, marcher, marcher, la fatigue donne ce vertige, impossible, impossible, impossible, quand le regard cherche, elles surgissent, ces chaises, des flashs de chaises envahissent la rétine, impossible, impossible, impossible, juste ce rêve fatigué de s'asseoir sans savoir où mais, oui enfin, s'asseoir au bord du mirage

Photo n°37 du blog Sannahkvist.se – She broke my heart so I broke her face

Polygones

Revanche glaciale d'un ciel asphyxié, il aligne au scalpel l'artifice, le sang lumière, le polygone devenu marionnette hurle de ses zébrures, le fantôme d'acier tranché est suspendu, encore une fraction de souffle, avant le déferlement, violence de la chute

d'après une photo de Bénédicte Reverchon, dans la série Les Lumières de la ville, visible à la galerie Vrais Rêves à Lyon et sur leur site vraireves (rubrique expositions en cours)

Petits diables

Petits diables sur un Tram
Ils enflamment
Jaunes
La course rouillée
d'une ville à
reconstruire
d'une ville à
hacher
d'une ville à
sourire libre
comme un chat
de Chris
Impertinence blanche
sur noir désastre.

d'après le sourire de la liberté une photo de Chris Marker d'après sa propre création sur les trams de Sarajevo

Au bord du précipice

Froid et solitaire, Buster K cherche comment ne pas se laisser congeler, Buster tient son trésor tout contre lui, à un pas de la tristesse, le précipice blanc est là, le regard tourné vers le passé, Buster n'a plus l'énergie des larmes, fragile, à un pas du cristal, prêt à fondre, Buster hésite à vivre,

Se donner encore quelques minutes pour les peut-être

Il ne veut plus enlever son masque blanc.

d'après une photo du film Ma Vache et moi de Buster Keaton, voir sur le site de l'institut Lumière de Lyon, http://www.institut-lumiere.org/, dans le programme de la rétrospective

L’homme infime

L'homme infime
sous la caresse des nuages
silhouette fuyant son avenir
pataugeant dans l'humidité du présent
il cherche entre la terre et l'eau
les stries du possible
les rêves enfin fossilisés dans le réel
un sens non-vacillant
à ses incertitudes.

d'après Crépuscule, une photo de la série Madagascar de Jean-Noël De Soye

la musique du carré gris

La musique sédimente sous nos pas, dans l'interstice des pavés l'enceinte est engloutie, dé-naissance, le son efface son visible, nos cerveaux battent, rythmes cacophoniques, les basses sont grises dans nos cellules, l'aigu hurle dans le désert, attente que quelque chose décide de frapper la mesure, donne enfin une résonance aux maigres tâches de couleurs, ne pas s'enfuir alors dans le ronron des musiques hurlantes, dans les crissements du tag rouge,
savoir écouter la plainte du carré gris.

d'après une photographie de la série Buracos (1996 – 2002) de Marcos Chaves

Ivresse des pétales

Elle s'ennivre
la griserie des pétales
coupe d'alcool dans ses mains

Son rire secoue l'arbre
De joie, il abandonne encore
des pensées éparpillées
Pétales où sont venues se nicher
l'intime des passants.

Les yeux fermés, elle hume
comme un vertige
entre l'envol et la chute
tous ces murmures inconnus.

d'après une photo d'Edouard Boubat (Paris, Parc de Sceaux, 1983)